La justice française se penche sur le système d'élections à la FIA
Les règles du scrutin pour la présidence de la Fédération internationale de l'automobile (FIA) sont-elles biaisées ? Le tribunal de grande instance de Paris se penche lundi sur une requête de la Suissesse Laura Villars, empêchée de se présenter face au seul candidat, le président sortant, l'Emirati Mohamed Ben Sulayem.
Laura Villars a assigné en référé la FIA devant le TGI, à qui elle demandera "la suspension immédiate de l'élection de la présidence de la FIA, organisée le 12 décembre 2025, à Tachkent en Ouzbékistan", jusqu'au prononcé d'une décision sur le fond de ce litige.
En effet, le règlement du scrutin impose aux candidats de présenter une liste comptant notamment sept vice-présidents pour le sport provenant des six régions du monde (deux pour l'Europe, un pour l'Amérique du Nord, l'Amérique du Sud, la zone Moyen-Orient et Afrique du Nord, l'Afrique et l'Asie-Océanie) et issus d'une liste approuvée par la FIA.
Or, une seule personnalité représentant l'Amérique du Sud figure sur cette liste, Fabiana Ecclestone, la femme de l'ancien grand argentier de la F1 Bernie Ecclestone. Et elle a accepté de figurer sur la liste de M. Ben Sulayem, candidat à sa réélection.
- "Défaillances structurelles" -
"Dans ces conditions, aucune liste concurrente ne pouvait compter, parmi ses sept vice-présidents, un vice-président pour la région Amérique du Sud, cette dernière participant déjà à la liste de la présidence sortante", observe Laura Villars dans son assignation. Celle-ci dénonce une "violation du principe de démocratie associative et de pluralisme prévu (dans les) statuts de la FIA."
"Les multiples et vives critiques adressées à la FIA, et plus précisément à son président Monsieur Mohamed Ben Sulayem, révèlent les défaillances structurelles de la Fédération en matière de respect des normes démocratiques et de transparence, auxquelles cette dernière a pourtant expressément affirmé se conformer", souligne aussi l'assignation de la pilote suisse de 28 ans, assistée par Me Robin Binsard.
"Finalement, un effet d'éviction structurelle était observé à l'occasion de l'élection de la présidence de la FIA", poursuit l'assignation.
L'Américain Tim Mayer, ancien commissaire sportif de la FIA, a également dû retirer sa candidature à la présidence de la fédération pour les mêmes raisons. Il s'est néanmoins adjoint les services de deux avocats français, qui effectueront une intervention volontaire à l'audience pour appuyer les demandes de Laura Villars.
- "Un exode" -
Ancien pilote de rallye, Mohamed Ben Sulayem a succédé fin 2021 au Français Jean Todt. Son premier mandat a été mouvementé. Il s'est notamment mis à dos les pilotes de F1 et de rallye pour avoir imposé d'importantes amendes en cas d'utilisation de mots grossiers lors des retransmissions télévisées. Devant le tollé suscité par cette mesure, il a finalement décidé de réduire de moitié le montant des amendes.
L'assignation de Laura Villars ne manque pas non plus de souligner les "multiples et vives critiques" émises par "certains des plus éminents membres" de la FIA, "dénonçant tous une défaillance de la gouvernance et l'extrême concentration du pouvoir aux mains de Monsieur Mohamed Ben Sulayem".
Un mode de gouvernance qui a conduit à plusieurs démissions de membres haut placés de la fédération, "un exode", pointe encore le texte de l'assignation.
"L'élection présidentielle de la FIA est un processus structuré et démocratique, visant à garantir l'équité et l'intégrité de chacune de ses étapes", avait affirmé fin octobre à l'AFP un porte-parole de la Fédération, relevant que des informations détaillées sur le scrutin étaient publiquement disponibles en ligne. La FIA n'a pas souhaité faire d'autres commentaires avant l'audience.
La décision sera vraisemblablement mise en délibéré.
A.Imbrogno--INP