
Un millier d'opposants défilent contre le canal Seine-Nord Europe

Plus d'un millier de personnes ont manifesté samedi à l'appel de collectifs écologistes près de Thourotte (Oise) pour appeler à "stopper le chantier" du canal Seine-Nord Europe, qui doit relier le bassin de la Seine aux grands ports du nord de l'Europe d'ici une dizaine d'années.
La manifestation, première mobilisation d'une telle ampleur contre ce canal, se tient dans le cadre d'un week-end militant à l'initiative de plusieurs collectifs dont Les Soulèvements de la Seine (une ramification des Soulèvements de la Terre), Extinction Rebellion et Mega Canal Non Merci.
"On cherche à montrer l'absurdité du projet", qui n'est "pas viable économiquement", estime Valentin, militant des Soulèvements de la Terre. Il plaide pour "réinvestir dans le Canal du Nord et investir dans le frêt ferroviaire" au lieu de construire un nouveau canal qui pourrait coûter jusque 10 milliards d'euros selon eux.
L'élue écologiste Sandrine Rousseau a critiqué ce projet porté par "des élus qui se prennent pour des pharaons" et qui va "multiplier les camions de chaque côté du canal". "Ce n'est pas un projet écologique quand on fait tout pour bétonner" a-t-elle estimé, appelant à des politiques publiques encourageant une consommation raisonnée et locale, et non des projets qui profitent à des importations venues "de l'autre bout du monde".
Agnès Ducharne, hydrologue chercheuse au CNRS, a manifesté car le canal, dont le chantier a débuté en 2022, est selon elle "un projet nuisible", "du siècle passé". Pour elle, "la communauté des chercheurs en sciences de l'environnement mesure que les politiques qui vont vers l'artificialisation sont nuisibles".
La défilé bon enfant avec fanfare et libellules géantes est organisé avec le soutien de l'Alliance écologique et sociale, incluant notamment la FSU, Solidaires, la Confédération paysanne, Greenpeace et les Amis de la Terre.
Pour ses défenseurs, le canal Seine-Nord Europe, qui doit relier la Seine à l'Escaut et aux grands ports du nord du continent grâce à 107 km de voies fluviales à grand gabarit, constitue une "solution écologique" qui réduirait le transport routier.
Mais les opposants critiquent cette autoroute fluviale pour son coût, son impact sur la biodiversité et les ressources en eau, craignant qu'il n'y ait pas de report modal mais plutôt une augmentation effrénée des flux.
Son coût prévisionnel estimé en 2019 est de 5 milliards d'euros, financés par l'Etat, des collectivités locales et des fonds européens. Déjà très supérieur aux estimations initiales, ce budget devrait être révisé en nette hausse.
Les opposants dénoncent aussi un "désastre environnemental", lié à l'artificialisation de "3.200 hectares de terres agricoles", "300 espèces protégées" menacées, ou encore une importante retenue d'eau, le tout compensé par des mesures jugées "illusoires".
M.Dodaro--INP