
Devant un tribunal américain, un expert alerte sur les risques accrus du changement climatique pour les jeunes

Les enfants sont affectés par le changement climatique "de façon unique et disproportionnée", a affirmé mercredi un expert médical devant un tribunal fédéral qui examine une plainte de jeunes Américains contre la politique favorable aux énergies fossiles de Donald Trump.
Citant des répercussions sur leur santé, ces jeunes attaquent, au nom de la Constitution, des décrets du président américain visant à faciliter la production de pétrole et de gaz, entraver celle d'énergies renouvelables et occulter le suivi des effets du changement climatique.
Vingt-deux plaignants, représentés par l'organisation à but non lucratif Our Children's Trust, contestent également des mesures qui sapent selon eux la recherche fédérale sur le climat aux États-Unis, des licenciements d'experts à la suppression de rapports, en passant par l'annulation d'une décision qui servait de fondement à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre dans le pays.
Au deuxième et dernier jour d'audience à Missoula, dans le Montana (nord-ouest), leurs avocats ont appelé Lori Byron, ancienne pédiatre hospitalière, à témoigner pour expliquer comment le réchauffement climatique affectait les jeunes.
Mme Byron, qui a pris part à des recherches climatiques au niveau local, a averti que le Montana devait s'attendre d'ici le milieu du siècle à davantage de journées de chaleur extrême, à des saisons des feux plus longues et plus intenses, ainsi qu'à des "surprises climatiques", telles que des inondations catastrophiques, plus fréquentes.
Proportionnellement à leur poids, les enfants "respirent plus d'air, boivent plus d'eau et consomment plus de nourriture (...) que les adultes", a-t-elle également expliqué, ajoutant qu'ils étaient particulièrement vulnérables aux maladies et aux blessures liées à la chaleur et aux phénomènes météorologiques extrêmes car leur corps est encore en développement et en raison de leur dépendance vis-à-vis des adultes.
Les conséquences sont aussi psychologiques, selon elle: "Leur cerveau est encore en développement, et la stabilité dans leur vie est très importante. Quand on est déplacé ou qu'on perd son foyer, ces expériences peuvent avoir des impacts sur la santé mentale qui durent pendant des décennies".
- "Défendre ma santé" -
Son témoignage a été suivi par celui d'Isaiah H., un adolescent de 17 ans originaire de Missoula et athlète en herbe, qui a évoqué son attachement à sa région, tout en expliquant qu'il devenait de plus en plus difficile de passer du temps à l'extérieur en raison de la multiplication des incendies de forêt et de la baisse des chutes de neige.
"Quand mon frère était tout petit, nous avons dû évacuer notre maison parce que la fumée était trop dangereuse (...) pour ses poumons", a-t-il notamment raconté.
"À 17 ans, je ne devrais pas avoir à intervenir de cette manière, ni devoir manquer l'école et rattraper des examens et des devoirs juste pour défendre ma santé et ma sécurité", a-t-il ajouté.
Cette bataille judiciaire illustre le déplacement croissant du combat climatique dans les tribunaux, souvent à l'initiative de jeunes gens.
"Ce serait inédit pour une cour de statuer qu'il existe, en vertu de la Constitution américaine, un droit à un système climatique stable", souligne auprès de l'AFP le professeur de droit de l'environnement Michael Gerrard.
L'action en justice à Missoula est pour l'instant au stade procédural: elle vise à obtenir du juge qu'il ordonne la tenue d'un procès. Le gouvernement fédéral, rejoint par 19 Etats conservateurs et le territoire de Guam, réclame un classement sans suite.
M.Dodaro--INP